Le portfolio de Pierre Compignie

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vendredi 7 juin 2013

uncharted 3 (ps3)

Uncharted-3-Drakes-Deception-Artwork-03.jpg

Voici ma critique d'Uncharted 3, terminé en difficile avec zéro trésor ramassé (j'ai bien fait attention à ne pas appuyer sur triangle n'importe où, un vrai champ de mines). Trois parties : le scénario, la cohérence et l'intérêt des phases de jeu, les haut-faits de la narration. Et pour finir une conclusion dans laquelle j'aborde la finition du jeu. Attention spoilers.

--Scénario--

C'est pas très bon, voire très mauvais. Je note des incohérences dans l'histoire :

+ L'énigme que John Dee est pas arrivé à résoudre avant de mourir et dont on retrouve les restes de ses notes, moi je la résous en cinq minutes.

+ Face au méchant Rameses (le chef des pirates) il y a quelques perles. Rameses à Nathan : « Tu m'as causé pas mal de problèmes ». J'ai tué tes hommes par dizaines, ouais !

+ Nathan tombe à l'eau et dérive pendant des heures jusqu'à une plage. Il faut voir la taille du morceau de bois qu'il a utilisé pour flotter par rapport à son gabarit... (http://youtu.be/xsohxerbWVg?t=1h3m43s)

+ Les méchants qui ne tuent pas les héros à chaque fois qu'ils en ont l'occasion, alors même qu'ils n'ont pas besoin d'eux, non mais ça...

+ La question de Sully adressée à Nathan : « Comment t'as bien pu faire ça avec trois balles ? » Il est question ici de la destruction de la cité souterraine initiée par effectivement trois coups de feu tirés par Nathan. C'est comme si Sully disait au joueur « tu vois bien que c'est n'importe quoi notre histoire ». Le scénariste : « Mon scénario il est bidon t'as vu lol ». Non moi ça ne me fait pas rire. Un jour il faudra quand même arrêter de nous prendre pour des imbéciles et tenter de rire avec nous de la médiocrité de votre travail (coucou Far Cry 3).

Au niveau de l'écriture je trouve les dialogues et conflits entre les héros totalement factices. Je sens le peu d'audace de la scénariste à faire du mal à ses héros (les tuer ou les faire se déchirer). Ils font toujours front commun face à l'adversité.

Nathan c'est un type complètement inintéressant parce qu'on reste à la surface du personnage, aucune situation ne l'oblige à se dévoiler, ne le met en difficulté et on reste devant la façade qu'il veut bien montrer. Ce type est un inconnu et d'apparence rien ne lui pose vraiment problème. Un type inintéressant, ou plutôt une histoire qui n'arrive pas à créer des enjeux et des obstacles à son héros assez forts pour le faire se dévoiler, le mettre en difficulté et le rendre enfin intéressant, permettre l'identification.

La seule fois où Nathan tire sur un méchant en cinématique (Rameses)(alors qu'il passe son temps à le faire quand on a la manette), ça reste timide, le gars meurt pas, le tir est à l'instinct... Limite c'est un accident et il lui a tiré dessus juste pour le faire fuir, pour se sortir du pétrin. C'est très frustrant pour moi joueur parce que je ne reconnais jamais dans les cinématiques le type avec qui je franchis chaque niveau du jeu, qui tue d'autres types en masse.

--Cohérence et intérêt des phases de jeu--

Il y a plusieurs types de phases jouables dans Uncharted 3.

L'évolution dans l'environnement. Nathan se déplace comme une savonnette mouillée. Il part dans tous les sens, il glisse, même s'il reste tout le temps contrôlable, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'inertie dans ses déplacements (donc savonnette seulement pour la légèreté et le glissement). Une bonne idée cependant, je trouve que c'est d'avoir fait en sorte que le personnage, lors d'un brusque changement de direction à 180º ordonné par le joueur, marche d'abord à reculons avant de se retourner progressivement. C'est peut-être pas encore très naturel mais c'est toujours plus crédible que les retournements instantanés de Lara Croft dans Tomb Raider Trilogy.

On a beau évoluer dans des environnements du monde réel, ils se limitent à peu près toujours à une ligne droite, un seul chemin, ce qui les a rendu pour moi tout à fait factices. C'est difficile de croire à un monde à ce point étriqué qu'en le parcourant on suit un couloir ou un chemin bien linéaire d'escalade. C'est assez hallucinant parce que des fois on a beau voir la ville de loin, très grande, une fois qu'on y est c'est pas une ville c'est une allée où toute sortie est grossièrement empêchée (sauts impossibles, portes fermées, murs invisibles, personnage qui revient sur ses pas – autant ça je comprends autant ça reste mauvais pour faire vivre l'environnement). Le bon côté ici c'est qu'on n'a pas d'indicateur d'objectif, mais là ça serait vraiment le bouquet si c'était le cas. L'environnement d'Uncharted 3 en un mot ? Factice.

Et ce, malgré une représentation graphique généralement très fouillée. « Ça fourmille de détails ». Mais rien n'y fait, j'ai l'impression de me balader dans un studio de tournage.

Les combats. Le nombre d'ennemis à affronter est beaucoup trop élevé pour coller avec l'histoire qu'on nous raconte dans les cinématiques (il y en a une où t'as un méchant à une bonne distance, il braque Nathan avec ses deux sbires, Nathan met la main à son holster, le méchant dit « je vous le déconseille » et là Nathan dit « et merde ». En jeu, t'as la même situation avec dix types tu défourailles cash). Ça m'est arrivé aussi assez souvent de me demander comment les ennemis étaient arrivés jusqu'ici. On n'a pas été suivi a priori, les ennemis ne devraient pas savoir qu'on est là ou alors on a dû crapahuter pour y arriver et finalement on se retrouve nez à nez avec une armée. L'histoire se tord jusqu'à l'invraisemblance pour ménager des batailles.

Ce sont les fusillades pures que je trouve intéressantes ici. La visée, la maîtrise de l'arme. Le réticule (en mode visée) est composé d'un cercle « piqué » à l'extérieur de quatre traits. À mesure qu'on tire en automatique avec l'arme, le cercle tremble, se lève, grossit et les quatre traits s'éloignent. Ça représente la dispersion de l'arme, dans quelle zone tu peux espérer que tes balles atterrissent (note : la caméra reste centrée en mode visée sur le centre du réticule, même élargi, ce qui fait que les tressautements de l'arme font bouger l'image). Il faut bien noter que le réticule est assez gros par rapport à des ennemis à moyenne portée. Ces derniers apparaissent souvent fins par rapport à notre cercle. Ce qui rend les tirs tête particulièrement satisfaisants parce que pas évidents du tout, d'autant plus que les ennemis ont tendance à bouger assez vite quand on a le réticule sur eux. Ainsi la fenêtre de tir pour faire mouche dans la tête est réduite. Si on opte pour une salve automatique, il faut compenser avec la dispersion de l'arme et les déplacements fréquents des adversaires. Ils restent rarement plantés à découvert longtemps et quand ils le font c'est en nous tirant dessus avec une précision redoutable (parce qu'on meurt alors très vite si on n'est pas planqué). J'ai utilisé le paramètre alternatif de visée qu'on peut sélectionner dans les options. Je trouve donc le challenge de visée très intéressant. Il n'est pas évident, il n'est pas non plus injuste, il demande au joueur de mettre à l’œuvre des compétences qui sont tout à fait à propos (justesse du maniement du stick, gestion de la dispersion, rapidité).

L'usage du tir à l'aveugle peut se montrer également redoutable et c'est un bon choix à faire contre un ennemi qui s'approche de notre couverture. En effet ce « tir à l'aveugle » depuis notre couverture jouit je crois d'une visée auto très fiable si un ennemi est à proximité et toutes les balles vont dans lui.

Maintenant ce qui est regrettable, c'est que ce challenge d'utilisation des armes, c'est un peu tout ce que proposent de signifiant les combats. La nouvelle possibilité pour la série de renvoyer les grenades qui nous arrivent dessus (via un mini-jeu complètement absurde qui plus est, si t'appuies sur le bouton trop tôt, c'est-à-dire bien avant que la grenade explose, le personnage ne la renvoie pas, va-t'en comprendre) encourage totalement à camper. On se choisit une bonne couverture, on mitraille avec talent en prenant garde de ne pas trop se prendre de balles d'affilée (autre absurdité du système, récurrent cette génération), quand une grenade arrive on la renvoie... C'est un peu toujours pareil, et c'est limité du fait que quand on meurt, on reprend dix secondes avant tellement les points de passage sont nombreux. J'adore tuer le dernier ennemi d'un « niveau » en mourant et reprendre au point de passage suivant. On n'a rien à gérer sur la durée, Uncharted 3 c'est comme plein de niveaux de deux minutes indépendants les uns des autres. Autant je trouve le travail fait sur l'usage des armes remarquable, autant c'est la seule chose que je retiens des combats et ça ne suffit pas à les rendre mémorables.

Autre chose, il faut attendre la toute fin du jeu pour avoir un peu de variété dans ces séquences. C'est-à-dire que du début à la fin, les combats varient assez peu. On va avoir plus ou moins d'ennemis, il y aura parfois des types avec un bouclier, des types en armure, des snipers, mais ça change pas grand chose. On pourra toujours rester à couvert et faire preuve de talent à la mitraille. Par contre, on finit par affronter des Djinns et là c'est différent. Parce que ces types, qui se présentent comme des ennemis normaux saut qu'ils saignent du sable, il faut d'abord les tuer normalement, ils sont particulièrement résistants et ensuite, ils sont comme possédés par des esprits et ils deviennent des genres de super soldats. Ils peuvent se téléporter et nous balancer des boules explosives. Face à eux il faut non seulement faire gaffe à ses déplacements (non seulement imprécis – savonnette – mais en plus c'est délicat de sortir d'une couverture parce qu'en inclinant le stick vers le bas ça décolle pas Nathan tout de suite, faut maintenir deux secondes, et en appuyant sur rond Nathan se décolle laborieusement et on peut pas filer instantanément ; alors on peut toujours faire des roulades quand on est à l'extrémité de la couverture, mais non seulement elles ne mènent pas bien loin mais en plus il faut y être, à l’extrémité de la couverture !) mais aussi choisir avec attention son armement. En ce qui me concerne j'ai opté pour le lance-grenades en arme principale et il s'agissait de faire attention aux munitions parce que je pensais que c'était la seule arme vraiment efficace contre eux. Il y a besoin de puissance de feu pour les abattre et il faut le faire vite parce qu'ils sont très dangereux, donc encore plus de puissance svp.

Il y a la possibilité de se battre au corps à corps, mais à part les chopes qui tuent en un coup, engager un type alors que ses potes nous tirent dessus c'est du suicide, parce que la baston est bien moins efficace que dans le premier Uncharted, il faut beaucoup de coups pour assommer un type et ils sont prompts à nous choper et nous (moi) à rater une esquive. Donc pas vraiment une bonne solution.

Je retiens des combats leur côté « maîtrise des armes » intéressant et c'est à peu près tout. J'oubliais : bien viser est d'autant plus difficile et primordial que les ennemis ne sont pas stoppés par nos rafales et donc ne deviennent pas plus faciles à viser ni ne sont arrêtés dans leurs tentatives de nous prendre par le flanc. C'est bien sûr par réaliste, d'autant qu'ils encaissent pas mal, mais ça rend le jeu intéressant. Quand un ennemi est touché, il y a juste un petit effet d'éclaboussure de sang je crois seulement visible de très près, par contre quand on réussit un tir tête ça se sent pas mal, l'ennemi est emporté net dans le hors-service physique. J'ai trouvé les tirs tête plutôt gratifiants, et les armes font bien vibrer la manette, on les « sent tirer ».

Après, il y a toujours tout de même le besoin de choisir sur quel ennemi concentrer ses tirs, mais c'est pas très dur et au pire on reprend juste avant, alors...

L'escalade. Le principal problème ici c'est qu'il y a toujours un chemin sur les parois qui semble avoir été pensé par les architectes au cas où un jour il y aurait un Nathan Drake aussi léger et habile qu'un petit singe qui voudrait escalader. Les prises sont bien voyantes et forment un chemin. Par exemple j'ai en tête la fin du jeu, il y a une sorte de tremblement de terre et le sol se sépare. Nathan tombe et se rattrape sur la paroi du bloc qui vient de se détacher. C'est tout marron, et il y a des carrés blancs sur lesquels il peut s'accrocher et bien disposés pour qu'il puisse remonter.

Je disais Nathan habile et léger comme un petit singe, littéralement. Il faut le voir pour le croire. Il est accroché avec ses mains à un rebord sur un mur, non seulement il arrive à se tenir non pas aplati contre la paroi (façon Lara Croft ère PS1) mais en plus les genoux pliés et les pieds bien appuyés contre le mur. Comme si le type, il était tenu par un mousqueton. Et ceci en permanence parce qu'il se déplace le long d'un rebord dans cette position. En plus de tout ça il arrive en étant accroché à un rebord à sauter au-dessus de lui. Lara Croft déjà elle mettait du temps pour se hisser, alors que c'était quelqu'un d'athlétique. Nathan il est beaucoup plus costaud que Lara et il arrive à sauter, dans les mêmes conditions, plus haut. C'est invraisemblable.

À faire à la manette, c'est excessivement simple. On dirige le stick dans la direction et on appuie sur croix pour que le personnage saute par là et se rattrape automatiquement. C'est anecdotique, ça ne demande aucune compétence au joueur, aucune précision, aucun timing et non seulement les objets auxquels on peut s'accrocher ressortent visuellement du décor par leur couleur et leur relief mais en plus Nathan tend la main quand on incline le stick vers un élément auquel il peut s'accrocher. Il y a vraiment rien à réfléchir, ça se fait machinalement, il n'y a rien de notable à mettre en œuvre : anecdotique.

Un mot sur les sauts de manière générale, parce que là je n'ai parlé que de l'escalade. Ça m'est arrivé de mourir pour deux raisons : soit je sautais sur un élément de décor qui logiquement a tout pour que Nathan puisse s'y accrocher – et en fait non – soit je sautais dans le vide et je me tuais parce que je pensais que le sol était à une altitude non mortelle pour le personnage. Pourtant à d'autres moments il me semble qu'il survit à des chutes d'une hauteur similaire mais comme le jeu décide arbitrairement de te demander de descendre en douceur par une escalade spécifique : avant de sauter dans le vide, plutôt que d'estimer la hauteur il faut en fait regarder s'il y a pas un endroit où s'accrocher dans les parages, ça voudra dire qu'il faudra passer par là pour atteindre le sol. C'est pas du tout cohérent.

Les poursuites. Ça n'a pas fonctionné pour moi dans le sens où ça avait beau être d'une simplicité d'exécution enfantine, c'était du par cœur, donc la première fois je savais pas qu'il fallait sauter à tel endroit et je mourrais. Ce sont des séquences assez laborieuses, où on s'évertue à suivre la caméra qui nous dit où aller et où on meurt parfois parce que c'est basé sur de l'apprentissage par l'erreur. C'est ni intéressant ni cohérent avec quoi que ce soit, le héros n'ayant ni plusieurs vies ni une caméra lui montrant le chemin.

Les fausses cinématiques. Il y a des niveaux du jeu où ce que le joueur doit faire pour gagner est vraiment insignifiant. On a pas mal de séquences à la suite d'une cinématique où sans aucune transition, pour que Nathan continue son mouvement, on doit maintenir la poussée sur le stick de déplacement. Ça m'a gêné parce que je ne voyais pas la transition et qu'il n'y avait aucun indicateur à l'écran. Cinématique et jeu se confondent, au point où la poussée sur le stick c'est comme si on devait maintenir la touche lecture pour regarder un film en DVD. La scène pour se relever des toilettes au début et le désert ensuite par exemple (super lourd au passage, enchaînement pendant dix minutes ou pas loin de poussage de stick et de cinématique, les deux qu'on peut facilement confondre évidemment : « attendez, le personnage fait plus rien là. C'est toujours le film où c'est terminé et je dois reprendre la manette pour faire avancer le personnage ? »).

Le plus insultant pour le joueur à mon sens c'est quand même les « QTE qui changent rien ». Le jeu te demande explicitement de marteler la touche rond pour résister au méchant qui veut te planter un couteau mais rien n'y fait, le couteau se rapproche inexorablement. Finalement tu es sauvé par un ami qui tire sur le méchant. Super les gars, ça valait le coup de me faire stresser sur mon Dual Shock.

Les énigmes. Je serai bref, elles sont toutes anecdotiques, j'ai juste envie de citer une situation qui m'a marqué. On est dans une grande salle avec plusieurs plate-formes carrées de trois mètres carré au-dessus du vide. Sur chacune des plate-formes il y a un brasero éteint. Avant de sauter sur une plate-forme, pour la rendre sûre, il faut allumer son brasero à distance en lançant dessus une torche brûlante. Je me suis demandé ce qui se passerait si jamais je la lançais dans le vide. Réponse : une nouvelle torche réapparaît sur le brasero à côté duquel tu te trouves. Et ce, à l'infini. No comment.

Certes c'était pas vraiment une énigme. Les « vraies » énigmes reposent sur l'observation du décor, la manipulation d'objets et la lecture du carnet, qui donne pratiquement les solutions. La mise en œuvre de ces dernières sont l'affaire de quelques minutes grand maximum. C'est pré-mâché.

--Les haut-faits de la narration--

Quand Sully se fait descendre et qu'on reprend la manette, Nathan crie « Vous avez tué Sully ! » et j'étais bien dans le trip, je me suis jeté avec hargne sur les ennemis. C'est vrai que c'est un peu le seul truc intéressant qui pourrait arriver à Nathan tel qu'on le connaît, qu'il perde son seul ami voire son père de substitution comme le suggère lourdement cet épisode (parce qu'en le disant de but en blanc mais sans nous le montrer, nous le faire ressentir). Il se retrouverait seul, ce qui arrive à la fin. Alors je me suis jeté sur les ennemis et je suis mort et la tension est redescendue. Elle était trop peu entretenue pour tenir et la difficulté des nouveaux ennemis qui apparaissent alors calme direct les ardeurs de Nathan. Un acte manqué, donc. Et Sully n'est pas vraiment mort hein, je précise.

--Conclusion--

Facile (même en difficile), Uncharted 3 est anecdotique. Je retiendrai seulement le maniement des armes, plus fin et intéressant que la moyenne. J'ai le sentiment d'un jeu pas abouti après l'avoir fini. Limite d'avoir joué à un prototype ou une démo, sans vrais niveaux qui « exploitaient » les règles du jeu pour faire vivre un périple cohérent et intéressant au joueur. Quelques mots sur la finition du jeu :

+ Je ne compte pas les arrière-plans flous qu'on aurait jamais vu dans U1 ou 2 (en Syrie, à un endroit tu regardes c'est un village plutôt bien détaillé, un peu plus loin c'est la campagne avec une texture immonde)

+ Une échelle dans une rue à Londres, Sully l'examine et si t'y vas pendant qu'il l'examine Nathan se retrouve bloqué dans les airs en tressautant. Véridique, ça me l'a fait les deux fois que j'ai joué le niveau en plus).

+ Sully et Charly qui marchent en bloquant sur un obstacle invisible (tapis roulant pour courir) en attendant que j'ouvre la porte avec Chloé.

+ La lumière dans certains passages est juste ridicule, le dos des personnages devient tout blanc et il y a des ombres pixelisées qui ressortent.

+ Nathan palpe le vide avec sa main à chaque fois qu'il passe près d'un mur et regarde dans tous les sens constamment. En avançant il regarde souvent derrière lui sans aucune raison.

+ Le jeu a peu de bruits d'ambiance, je l'ai souvent trouvé muet.

mercredi 24 avril 2013

bioshock Infinite (ps3)

lizcomstock_ONLINE.jpg

Jeu terminé en mode 1999 (4/4).

Je spoile grave.

Ça fait déjà quelques semaines que j'ai terminé le mode 1999 de Bioshock Infinite. J'ai terminé le jeu une seule fois et c'était dans ce mode. J'ai dû le débloquer avec un code, sinon il n'est accessible qu'en terminant le jeu une première fois. Ken Levine et son équipe avaient peur qu'un joueur sélectionne ce mode par erreur et abandonne le jeu dégoûté par la difficulté. Ça me paraît absurde étant donné que 1999 apparait clairement lors de la sélection du mode de difficulté comme le mode le plus difficile du jeu réservé aux "plus hardcore des core gamers si si on vous jure ATTENTION DANGER". Ils nous prennent pour des jambons. Non seulement les développeurs s'assurent que leurs jeux soient accessibles à tous mais maintenant ils cachent leur mode extrême. De peur que le type qui achète son jeu minimum 40 euros "tombe" dessus "par mégarde" et abandonne par frustration (dixit les dévs "(parce que) ce jeu est stupide". On notera que selon eux le joueur ne dira pas "c'est trop dur pour moi" mais "ce jeu est stupide". Si ça c'est pas du mépris !) au bout d'une heure ou deux. Soit.

Je peux pas dire que je retienne grand chose de Bioshock Infinite. Je me rappelle l'avoir fait, je me rappelle mon enthousiasme par rapport au challenge de ce mode 1999, je me rappelle mon espoir de voir l'histoire décoller à environ la moitié du jeu. Et je me rappelle aussi de ma déception grandissante à mesure que l'aventure arrivait à son terme tout au long du dernier tiers. Si j'ai été aussi peu marqué par le jeu malgré son challenge que j'ai apprécié, c'est parce que celui-ci était complètement déconnecté du scénario. Bioshock Infinite bat des records en terme de friction entre la narration et le jeu. Il affiche un mépris non seulement pour la narration qui passe par le jeu, mais au-delà de ça également pour le scénario qui l'encadre. Parce que les péripéties de Infinite, les aventures du héros qui amènent à tous ces combats, tout ce challenge - toute l'épopée qu'on vit à la manette ; et bien ça n'a que très peu d'importance dans l'histoire que in fine Infinite cherche à nous raconter. On se rend compte au terme du récit que tout ce qui est signifiant arrive dans la fausse cinématique du début et dans la fausse cinématique de fin (je dis fausse parce que même si on n'a rien à faire on a toujours un minimum de contrôle, le regard et / ou les déplacements). Tout ce qui s'est passé au milieu, le "récit d'action" - piètrement écrit - qui fait naître les niveaux du jeu... et bien on s'en fout. L'important dans l'histoire c'est le début et la fin, là où on ne joue pas.

En plus de ça il manque plein d'éléments pour que l'ensemble soit cohérent. En l'état l'histoire ne tient pas debout. Pour argumenter j'ai juste à dire "ponton magique" et demander pourquoi et comment. Je défie quiconque de me répondre. J'ai une montagne d'autres interrogations et les réponses que j'ai pu trouver, soit elles relèvent du TGCM*, soit elles appellent d'autres questions - et en fait souvent les deux. Columbia, c'est ma ville magique, tu l'aimes ou tu la quittes.

Dernier problème et pas des moindres, l'univers est fait de bric et de broc. Il y a des choses qui sonnent très fausses. Par exemple, une caisse d'oranges sur un étal. Il y aura UNE orange qu'on peut ramasser, modélisée en 3d, posée sur le tas des autres oranges qu'on ne peut pas ramasser, formé d'un seul bloc. Mais le pire ça reste les habitants. D'abord on les vole tranquille. Un marchand de hot-dog, on se dit on va peut-être lui en acheter un pour remonter sa santé. Au temps pour moi, il y a un hot-dog sur son stand et il ne dit rien quand je le boulotte. De manière générale on passe son temps à voler les gens, fouiller dans leurs valises, manger leurs casse-croute et ils ne réagissent pas. Ce qui est crétin d'autant plus qu'à certains moments du jeu la "mécanique" existe, les interactions s'affichent en rouge pour indiquer que si on fait ça, on va avoir des problèmes. Mais quand ce n'est pas prévu, aucun problème, on pille tout ce qui nous tombe sous la main. Les gens ne réagissent pas à notre présence et à nos actions : personne s'étonne de voir un type faire les poubelles dans la rue. Les phrases que récitent les habitants (immobiles) de Columbia quand on s'approche d'eux en font systématiquement, au choix, des illuminés, des idiots pédants ou des soumis. La nuance ça n'existe pas à Columbia. Y'a pas un seul PNJ qui évite la caricature grotesque de Levine.

De la même manière, personne ne réagira si on se balade dans la rue avec une grosse gatling à la main. Même pas les gardes, qui pourtant devraient avoir notre signalement, quand le jeu en a décidé ainsi. Super logique. On peut se demander aussi pourquoi personne à part certains ennemis n'utilise aucun des pouvoirs que l'on collecte dans l'aventure et dont les améliorations sont vendues dans des distributeurs à chaque coin de rue. Oui, pourquoi ?

Parlons du challenge du mode 1999. Il est à la fois intéressant et sur trop d'aspects déconnecté du scénario. Intéressant voire passionnant parce que faisant naître une vraie tension chez le joueur. Les poins de passage sont éloignés, il n'y a pas de sauvegarde manuelle, et les résurrections coûtent très cher, ce qui incite à ne pas les utiliser. Les combats sont très durs, du coup, juste pour espérer pouvoir survivre jusqu'à la fin du jeu, on a envie de mettre toutes les chances de son côté. Ce qui se traduit par : fouiller chaque centimètre carré de décor pour des ressources qui serviront à améliorer notre personnage et ses capacités. Ces phases sont longues et assez éprouvantes pour les yeux, et une fois accomplies, le but est d'arriver en un seul morceau à la prochaine sauvegarde automatique. Bonjour la tension ! On est franchement pas loin de Demon's Souls. Les affrontements pour la plupart sont assez justes, c'est-à-dire qu'en faisant attention on s'en sort. Mais ils sont mortels, et devoir en enchaîner plusieurs met bien la pression.

Le problème c'est qu'on est ainsi pas bien encouragé à expérimenter les combinaisons de pouvoirs, voire même l'ensemble des pouvoirs. Le truc un peu débile, c'est que le jeu juge bon de nous faire part de certaines combinaisons gagnantes pendant les temps de chargement au lieu de nous les expliquer clairement en jeu ou dans le manuel. Je vois pas trop la logique là-dedans, soit les développeurs veulent qu'on découvre par nous-même et ils ne disent rien nulle part, soit ils l'expliquent sérieusement, mais planquer des règles de jeu dans les temps de chargement... Vraiment moyen.

Il y a également des exceptions à la règle des "combats justes". Il y a une poignée d'affrontements (5 ou 6) que j'ai trouvé très très chauds et que j'ai dû recommencer plusieurs fois avant de trouver une stratégie payante. Le combat final n'est pas le plus dur par contre, mais obéit lui aussi à la loi de l'apprentissage par l'erreur.

On a un bel exemple de friction entre la narration et le jeu avec Infinite. On est dans de l'action-RPG, soit. C'est-à-dire un genre - casse-gueule - qui mélange une représentation réaliste de l'action avec des composantes RPG donc abstraites. Bioshock Infinite met en scène exactement de la même manière une conversation entre Booker et Elisabeth et une minute plus tard le même Booker dans une séance furieuse de loot enragé. Non ! Non, développeurs, non. Mass Effect 2 réussissait pour moi à tenir à peu près en équilibre sur le fil, malgré ses ennemis à barres de vie qu'il faut vider successivement. Mais Bioshock Infinite s'étale complètement ! En mettant sur le même plan les scènes cinématiques qui font vivre le scénario et des séquences de jeu d'une rare abstraction (voler impunément, looter comme un malade ou tout simplement perdre un temps fou pour faire évoluer son personnage alors que les personnages sont dans une logique d'urgence), les développeurs se tirent au lance-roquettes dans le pied. Le problème est à deux dimensions : non seulement les règles de jeu sont - plus ou moins - abstraites, mais en plus le jeu ne fait aucun effort pour compartimenter ces phases de jeu, les séparer de la représentation réaliste de l'action. Un RPG japonais comme Final Fantasy XIII par exemple. Bien sûr que l'ATB avec les barres qui se remplissent c'est une abstraction. Mais non seulement c'est pas une abstraction si éloignée que ça du propos (préparer son attaque) mais en plus le jeu fait en sorte qu'on ne retrouve pas dans la représentation réaliste de l'action (les cinématiques et les déplacements dans le décor) des jauges ATB qui se remplissent. C'est limité au cadre des combats qui font exploser l'écran et nous font nous retrouver dans une arène. Bioshock Infinite se plante sur les deux tableaux avec un système de loot surréaliste (des crochets, de l'argent et des potions partout dans le décor) qu'il ne fait même pas l'effort de placer dans un contexte où il ne jurerait pas avec la mise en scène réaliste à laquelle il prétend.

Deux autres choses qui ne vont pas : la résurrection monnayée (?) et le fait de pouvoir revenir en arrière dans l'aventure.

Donc pour moi il y a clairement un mépris, une absence de volonté de considérer ce que peut raconter un système de jeu. Mais il y a aussi malheureusement un mépris du scénario de jeu vidéo. L'aventure qu'on joue - c'est-à-dire pas la vraie qui se passe au début et à la fin en fausse cinématique - est remplie à ras bord de facilités et de combats au nombre juste exagéré. Alors que les personnages ont des "grappe-ciel" qui leur permettent de glisser sur les câbles de la ville, il faut qu'ils alimentent en électricité la navette hors service se déplaçant sur des... câbles, pour avancer vers leur destination. Comble de malchance, le bâtiment où on pouvait trouver le pouvoir électricité a été pris d'assaut par un fou furieux et son armée. Ben voyons. Plus tard dans le jeu, après que les héros se soient fait voler comme des bleus leur dirigeable par des pirates (ça ne s'invente pas), les dits-pirates leur réclament d'aller chercher des armes et en échange ils leur rendront leur dirigeable. Soit. Problème, l'armurier n'est pas chez lui. Il a été kidnappé et est maintenant retenu dans un... allez, un petit effort... oui, bravo ! Un bâtiment contrôlé par un fou furieux. À tous les coups on gagne ! Mais le meilleur ça reste quand les héros arrivent devant le stock d'armes, une petite montagne et qu'ils se posent la question magique : "et au fait, comment on va faire pour les transporter ?"

...

Sérieusement ? Je me la suis posé la question, et avant eux. Je me fiche pas mal qu'après ils reconnaissent leur débilité, c'est celle du scénariste qui est en cause, pas la leur. Pourquoi les personnages ne se sont-ils pas posé AVANT la question de COMMENT ils allaient faire pour transporter un stock d'armes servant à alimenter une armée de révolutionnaires ? C'est juste accablant.

Mais c'est après ça que j'ai eu mon coup de boost d'enthousiasme. Jouer était intense et pas chiant, c'était déjà pas mal, et si jusqu'ici les péripéties étaient relativement cousues de fil blanc, au moins les échanges entre Booker et Elisabeth donnaient de l'âme à l'expérience. Mais alors à partir de ce moment, l'histoire opère un grand virage et j'ai eu l'espoir d'un truc ultra poignant. C'est simple, jusqu'à chez Fink on est dans le mauvais récit d'action avec des obstacles pour les personnages très impersonnels. Mais, après la découverte du cadavre de l'armurier, Elisabeth utilise son pouvoir pour ouvrir une faille vers un monde où ce dernier n'est pas mort. Le truc inédit, c'est qu'elle étend la faille à l'infini cette fois. On ne pioche plus seulement des trucs dans un autre monde via une fenêtre, on a sauté par la fenêtre. On se retrouve donc dans un endroit similaire mais qu'on sent différent. Les soldats qu'on a tué dans l'autre monde sont ici secoués de spasmes et finissent par mourir tout seuls, parce que, nous explique-t-on, leur cerveau ne peut gérer le souvenir d'être mort (mieux vaut ne pas approfondir, je cherche à dire du bien là). On retourne donc à l'armurerie et là, bien logiquement, l'armurier a les mêmes problèmes que les soldats.

Et là je ne me rappelle plus de la suite mais je sais qu'Elisabeth va utiliser plusieurs fois son pouvoir pour éliminer les obstacles sur leur chemin, jusqu'à commettre l'irréparable et que nos héros se retrouvent dans un monde complètement bouleversé par les modifications successives. Un monde où Columbia a basculé dans le chaos et où la Vox Populi, le groupe révolutionnaire, est en train de renverser le régime dictatorial.

À ce moment-là j'y ai franchement cru. En découvrant la cité en flammes en même temps que Booker et Elisabeth je me suis senti pour la première fois réellement concerné par leur sort : "ah merde, là c'est du sérieux". Elisabeth, en usant et abusant de ses pouvoirs a tout changé. Les deux héros se retrouvent dans un monde qu'ils ne reconnaissent plus, dans lequel ils n'ont plus aucun repère. Dans ce monde, Booker est mort en héros de la révolution. Il commence à saigner du nez. Jusqu'où cela va-t-il aller ? Les choses pourront-elles redevenir un jour comme avant ? Comment diable Booker et Elisabeth vont-ils s'échapper en vie de cet enfer ? Quelle catastrophe Elisabeth est-elle en train de provoquer malgré elle en jouant à Dieu ?

C'est extrêmement prometteur, autant que le passage au Panama de Max Payne 3 où j'espérais que le héros péterait un méga câble ensuite, ou autant encore que le deuxième tiers de Xenosaga III où l'héroïne se retrouve à revivre des événements traumatisants de son enfance en tant qu'adulte avec la possibilité de les changer (avec la menace de la destruction de la ville en arrière-plan, comme dans Bioshock). On est à ce moment bien loin des rebondissements jeu vidéo sortis d'un chapeau et autres "quêtes des cristaux" qui faisaient les enjeux jusqu'à présent. On est en plus aux premières loges pour voir la chute de Columbia.

Mais vous vous en doutez, ça ne va pas durer. Les promesses ne furent pas tenues, et c'est un enchaînement non stop de combats contre les deux camps qui nous amèneront à la dernière partie du jeu, introduite par un fantôme (oui oui, cf. la fantastique tirade de Booker à Elisabeth "ta mère est un... FANTÔME ??"), qui elle enterrera définitivement l'histoire de Infinite.

Tout commence par un rebondissement hyper mal introduit mais intéressant. Booker est séparé d'Elisabeth, il traverse un pont pour la retrouver, un pont qui mène à la demeure du méchant. Le truc c'est qu'en traversant ce pont, Booker avance de 50 ans dans le temps. On découvre alors dans la demeure de Comstock la vie qu'Elisabeth a mené durant ces cinquante dernières années. Des audiologs et une scène de projection magnifique (vraiment) nous racontent l'espoir d'Elisabeth de voir débarquer Booker pour la sauver, espoir finalement maté par le temps et les scientifiques de Comstock. Dans cette dimension Booker n'est jamais venu et l'espoir d'Elisabeth a laissé place à une amertume qui l'amena finalement à accomplir la prophétie de Comstock, c'est-à-dire la destruction du monde d'en-bas (la ville de Washington si je ne m'abuse). Dans une salle un film est projeté où la vieille Elisabeth raconte tout ça et j'ai trouvé cette séquence percutante, incroyablement mélancolique. À ce moment-là je disais pourquoi pas les mecs. Pourquoi pas partir dans cette direction, même sortie d'on ne sait où (la traversée du pont), si c'est pour avoir des scènes comme ça et des enjeux pour Booker qui peut-être s'envoleront à des altitudes similaires.

Deuxième déception : la vieille Elisabeth est redevenue gentille et nous transporte dans le monde original, et on retrouve Elisabeth peu de temps (ou bien six mois, j'ai pas compris) après l'avoir laissé, on la sauve d'une séance de torture et c'est reparti comme en 40. Bioshock Infinite, ou l'art de désamorcer ses propres bombes narratives.

Le jeu se terminera dans un océan infini (d'où le titre je suppose) avec plein de phares et des pontons qui les relient qui se construisent à mesure qu'on marche dessus. Poudlard n'est pas loin. Le héros se retrouvera dans une salle secrète de l'espace-temps universel où il se laissera noyé par sept Elisabeth pour qu'il ne devienne dans aucun univers le méchant Comstock. Pour se retrouver après le générique dans son cabinet de détective privé. Et voilà, c'est terminé.

Je crois que j'ai tout dit sur le jeu. Ah non, il me semble important de saluer l'absence de tout indicateur d'objectif en mode 1999, ni carte, ni GPS, ce qui est une barrière considérable qui saute pour l'immersion dans l'environnement. Autrement dit, pour la qualité et l'intérêt de la retranscription en challenge du fait d'explorer. On ne meurt pas quand on tombe dans le vide. On réapparait à l'endroit précis d'où on a voulu se suicider. C'est bizarre mais las, le jeu n'en est pas à une bizarrerie près. Le challenge était intéressant, je veux dire le jeu a été plutôt sympa à battre, mais le fait est que trois semaines après l'avoir fini j'en retiens très peu de choses. Et à mon avis, c'est dû à l'extrême friction entre la narration et le jeu. C'est limite un cas d'école, tout ce qu'il faut pas faire tu le retrouves dans Bioshock. Pour nous les étudiants en game design c'est un jeu à faire. Restent deux promesses scénaristiques non tenues et la magnifique séquence où Booker, perdu dans le futur, séparé d'Elisabeth par les affres de la physique, prend connaissance du destin de la femme qu'il aime (j'aurais aimé) dans une salle obscure où le film de ses mémoires est projeté.

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*TGCM : Ta Gueule C'est Magique

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MàJ : Il y a un point que je n'ai pas abordé et ça m'embête, c'est comment la difficulté donne du corps à l'histoire. Le fait de devoir faire preuve d'une extrême prudence en avançant, que chaque pièce traversée constitue en soit une victoire ça donne de l'épaisseur à l'expérience. On se sent facilement dans les bottes du héros tellement c'est dur, tellement chaque mètre qu'il parcourt on le sent passer. En cherchant une vidéo pour montrer la scène que j'évoque plus haut - la projection, j'en ai trouvé une et j'ai eu l'impression que le joueur filait à travers le niveau de manière bien plus "légère" que moi. Ça semblait plus facile pour lui et j'observais que sa progression était beaucoup moins sentencieuse que la mienne. Moi je progressais de manière presque solennelle, et quand je suis arrivé dans cette salle de projection, j'étais à la cathédrâle. J'avais trouvé un havre de paix momentané et je m'en suis allé aussi avec respect. Alors que le joueur de la vidéo, il s'en est allé presque guilleret la fleur au fusil, en lâchant une phrase du genre let's go kick some ass. J'exagère, mais il traçait sa route, et il prenait le truc à la légère.

Bien sûr on a peut-être réagi de façons tout simplement différentes à la scène, moi j'ai été peut-être été plus ému que lui par le film projeté. Ceci dit, je pense que la difficulté en mode 1999 crée une gravité, dans le ton, dans le propos. La difficulté du jeu produit une expérience (ou raconte une histoire) de survival intense où chaque déplacement est à mesurer. C'est ça que je n'ai pas retrouvé dans la partie de ce joueur, qui filait sans souci dans le niveau et n'avait pas l'air affecté plus que ça par la séquence de la projection. Alors que moi, qui tremblait à chaque déplacement, je l'ai vécu à fleur de peau. Je suis sorti religieusement, j'ai même pas arrêté le projecteur, alors que j'aurais pu.

C'est lié je crois.

mardi 23 avril 2013

killzone 2 (PS3)

Killzone2_PS3_Ed017.jpg

Jeu terminé en difficile avec l'option haute précision activée.

J'ai consciencieusement ignoré les "renseignements" à collecter et les "symboles" cachés à dégommer. Quand le jeu nous présente ces objectifs pour la première fois, il nous dit pour l'un que ça servira à débloquer des récompenses sur killzone.com et pour l'autre que l'on gagnera un trophée. Ok. Vous pensez donc, développeurs, que c'est compatible d'épouser les enjeux de Sev Sevchenko dans son épopée guerrière sur Helghan que vous vous êtes donné un mal fou à mettre en scène, et, d'un autre côté, se préoccuper d'agrémenter son compte PSN d'un trophée supplémentaire et débloquer un papier peint sur votre site internet ? Hum, comment dire... You're doing it wrong.

Je vais arrêter le suspens, j'ai plutôt bien aimé Killzone 2. Ce que je viens de décrire c'est le genre de choses qui m'horripilent dans les jeux mais j'ai pu l'ignorer et ça ne m'a rien gâché finalement. En fait Killzone 2, je pense que c'est les meilleurs combats de FPS sur Playstation 3. Rien que ça, et facile en plus. Ce qui l'empêche de briller pour moi, d'être un chef d'oeuvre, c'est un mélange de plusieurs choses. Une histoire que je trouve très très confuse, même en ayant fait le jeu deux fois - avec des années d'écart - je serais incapable de la raconter ; un level design encore timide, un peu coincé entre des environnements réalistes et les impératifs de liberté laissés au joueur ; et enfin le format pop-corn des grosses productions qui limite forcément l'intensité du récit puisque les points de passage sont très nombreux et qu'on a absolument rien à gérer hors notre survie jusqu'à la fin de la portion de niveau - des petites portions de niveaux qui sont quasiment indépendantes. Et bien, développons tout ça !

Les meilleurs combats jamais vu dans un FPS sur Playstation 3

Il est temps que je le dise, j'ai joué sans réticule. Je l'ai désactivé dans les options, séduit que j'étais par le rendu des séquences de jeu présentées dans cette bande-annonce. Le résultat est énorme. Je crois que c'est une barrière de plus qui saute pour se sentir dans l'action. C'est d'autant plus génial que le jeu semble avoir été conçu pour être joué comme ça. Je m'explique. Déjà, c'est bien plus intéressant d'un point de vue challenge. Sans réticule, on doit tirer comme le soldat au jugé, en pointant son arme dans la direction où l'on pense que ça va faire mouche. Le jeu permet ça - je dirais même l'encourage - par le comportement des armes, les retours au joueur, l'abondance de munitions ainsi que les réactions des corps ennemis aux tirs reçus. Les retours sur l'impact de chaque balle sont ultra clairs, c'est-à-dire qu'on voit vraiment où chacune de nos balles atterit et ainsi on peut ajuster sa visée en fonction. Les armes ont chacune une précision et une dispersion un peu différentes mais toutes sont fiables au moins dans la première rafale, c'est-à-dire qu'elles tirent au milieu, dans un cercle ni trop large ni trop réduit. Les armes sont aussi de puissance différente. Par exemple, le pistolet mitrailleur, c'est une arme bien précise, avec une faible dispersion qui permet de tirer en continu sans perdre trop en précision, mais en contrepartie il faut beaucoup de balles pour mettre un soldat à terre.

On voit très bien l'impact de chacune de nos balles, soit par un effet un peu d'éclair quand ça tape dans un mur soit par une sorte de rond blanc qui assez vite rougit et disparaît quand on tire sur un corps. Un peu comme du métal chauffé à blanc, le point d'impact ennemi est d'abord blanc, rond, puis disparait en rougissant. C'est un outil énorme et assez subtil finalement, qui dénote pas trop avec le réalisme, pour donner un retour au joueur sur l'issue de son tir. Les impacts sur les ennemis sont plus visibles que sur le décor, c'est-à-dire qu'on va vraiment voir quand on arrive à toucher quelqu'un.

Les munitions sont abondantes, on n'a pas du tout à se préoccuper de notre stock, à chaque point de passage et même entre les points de passage on en récupère (d'ailleurs notre pistolet - on porte une arme et un pistolet - a des munitions infinies), donc aucun problème pour jouer la guerre comme elle se doit, au jugé. On peut tout à fait se permettre niveau munitions de loger des balles dans le décor pour ajuster sa visée et faire mouche ensuite.

Il faut dire aussi que les corps ennemis, pris dans une rafale, subissent le choc et sont incapable de riposter. C'est-à-dire qu'on est dans un jeu où si on arrive à prendre l'ennemi dans une salve à courte portée, il est mort, on a gagné, il pourra pas nous faire perdre de la vie.

Et c'est un peu ça le génie de Killzone 2, il nous pousse à jouer l'offensive. L'iron sight ? Il est lent, et pas si précis que ça. Quand on est sous le feu ennemi on en chie grave. Il y a un système de couverture. Mais c'est ultra laborieux de jouer planqué sous les tirs ennemis. Ils visent bien et ils font mal en difficile.

Alors que si on se met à courir, à se déplacer intelligement pour arriver sur le flanc des Helghasts, des bons tirs au jugé bien assurés ça veut dire victoire. D'autant plus que les Helghasts sont pas super à l'aise pour tourner sur eux-même rapidement. On a un vrai avantage quand on arrive derrière eux ou sur leur flanc ; et là il faut tirer au jugé, j'insiste, pas à l'iron sight. Parce que Killzone 2 est un jeu où l'iron sight n'est pas cheatée : on est bloqué sur le centre de l'écran (donc si l'ennemi se déplace sur le côté c'est mort), la position iron sight ne s'adopte pas instantanément et elle n'efface pas du tout le recul de l'arme qui est surtout encore plus perceptible à l'écran (puisqu'on est du point de vue de l'arme) et du coup encore plus gênant. L'iron sight n'est pas inutile dans ce jeu, mais c'est uniquement pour les tirs à longue distance qui nécessitent une grande précision. Et le jeu en est finalement assez avare, et c'est tant mieux. Et bien sûr en mode iron sight notre mobilité est extrêment réduite. Il y a tout intérêt à tirer au jugé, à rester mobile, à se déplacer et le challenge de visée est très intéressant du fait de l'absence de réticule qui tend à abstraire un petit peu la compétence qui nous est demandée. Ici il s'agit littéralement de pointer son arme au jugé et se fier aux impacts pour ajuster si besoin sa visée. Ça donne en plus un côté bordélique, chaotique, pas assuré, qui sied parfaitement, j'imagine, à ce que vivent les personnages dans cette guerre.

Les grenades sont très utiles quand l'ennemi est à couvert sur une terrasse. Rien de tel qu'un lancer de grenade pour nettoyer une terrasse qui nous empêche d'avancer. Pour les groupes d'ennemis aussi c'est très bien, parce que leur rayon d'effet est assez élevé.

On a affaire pour moi aux meilleurs combats armés de cette génération dans un shooter. Les armes vibrent différemment au gré de leur calibre et de leur cadence de tir, les impacts sont super bien communiqués au joueur, sans le réticule c'est le festival de l'immersion, les corps ennemis réagissent de manière assez impressionnante aux rafales de tirs (éclaboussures de sang, animations). On est amené à se déplacer constamment de façon tactique pour prendre l'ennemi à revers et ensuite c'est à notre skill de visée que l'issue se détermine, on doit prendre en considération le recul et la précision de chaque arme, on balance des grenades pour nettoyer une position ou se ménager un repli... C'est crédible et passionnant à jouer.

Un format pop-corn qui plafonne l'intensité

Les chapitres (niveaux) du jeu sont divisés en une multitude de sous-niveaux, qui font l'objet d'un point de passage quand on les atteint. Si on prend en plus en considération le fait qu'on n'ait à gérer ni les munitions ni la santé (auto-régénération), on se retrouve avec plein plein plein de petits niveaux, très courts, quasiment indépendants les uns des autres. La tension est toujours de courte durée, elle redescend d'un coup à chaque point de passage, et les points de passage sont rapprochés. Les jeux que j'ai trouvé les plus intenses, les plus intéressants, sont des jeux qui demandent un effort sur la durée, une implication de longue haleine avec par exemple de longs niveaux (Forbidden Siren, ou Doom 3 plus récemment). Killzone 2 est un jeu pop-corn avec tout ce que le terme a de péjoratif : on y entre aussi vite qu'on en sort, ça pourrait être un jeu de console portable à jouer dans les transports en commun, un sous-niveau à la fois.

Une histoire méga confuse

Alors j'ai compris que c'était la guerre et que ça tirait. Les tenants et les aboutissants par contre... Ils me sont passé au-dessus. Les soldats qu'on suit sont un peu caricaturaux pourtant le jeu se prend très au sérieux. Le ton du jeu est très premier degré. On reste tout le temps du point de vue du soldat qui suit les ordres et on comprend encore moins que lui ce qui se passe parce qu'on est projeté d'un coup dans sa peau au début d'une mission sans qu'on ait eu une cinématique qui nous explique de quoi tout cela relève. Je me suis demandé où les habitants de la planète étaient tous passés. L'histoire est franchement pas intéressante, les enjeux de soldats qui doit obéir moi je m'en fous un peu, reste que c'est difficile de s'ennuyer vu la haute teneur en action du jeu et du fait que ça ne s'arrête jamais ou presque (les combats).

Un level design timide

Il y a des bons moments, je dis pas le contraire. Mais à mon avis on est encore face à un jeu où les level designers semblent bloqués par l'impératif graphique d'en mettre plein la gueule au joueur, c'est-à-dire reproduire le plus fidèlement des environnements réalistes et impressionnants, et celui (l'impératif) de laisser de la liberté au joueur, en l'occurrence le choix des armes. Alors qu'avec un peu plus d'audace dans ces domaines, on aurait pu avoir des niveaux (ou des sous-niveaux) bien plus intéressants.

Alors je dis pas, y'a des passages que j'ai trouvé qui faisaient très bien le boulot (je me rappelle une scène où on doit prendre une position où il y a une antenne à détruire vers le début du jeu), mais à mon avis ça pourrait être encore plus poussé. Par exemple, imposer pour une séquence une arme au joueur (et que ça soit partie prenante du scénario bien sûr) et créer l'architecture, le nombre d'ennemis, leur comportement, en fonction de ça.

Je pense à Metal Gear Solid. Les missions virtuelles. C'est un truc génial. Les level designers sont complètement libres de chambouler les règles et l'architecture à leur convenance pour créer un challenge intéressant, qui va poser un affrontement au joueur qui va donner lieu chez lui en gagnant à une mise en oeuvre bien particulière de certaines compétences. C'est comme ça qu'on raconte une péripétie d'un personnage par le jeu.

Le problème c'est que ces missions virtuelles, sont virtuelles. Il s'agit pour les développeurs d'arriver à faire du level design aussi intéressant que dans des missions virtuelles, mais au sein d'un scénario et d'un environnement crédible. C'est pas du tout évident, et je trouve que Killzone 2, comme beaucoup d'autres, reste à un niveau assez basique de level design dans son ensemble. Autant j'ai noté des passages bien, autant je sens vraiment un manque de maîtrise du LD au profit de... la cinématographie ? Je suis le premier à défendre l'importance d'un scénario et la crédibilité d'un univers, mais justement, une équipe de développeurs le challenge qu'elle a quand elle cherche à raconter une histoire (là je parle uniquement par le jeu) c'est qu'elle soit à la fois intéressante et crédible. Là en l'occurrence je trouve que le souci de crédibilité l'emporte sur l'intérêt. Mais le jeu repose sur des bases extrêmement solides, ça le sauve un peu, mais je le vois, je le sens que ça pourrait être tellement mieux.

Et l'auto-régénération dans tout ça ?

Çe ne m'a pas posé problème, je pense que le jeu est assez clair avec lui-même sur les limites de son ambition. Ça se ressent au niveau du scénario qui suit un soldat qui ne fait qu'obéir aux ordres. Je pense que Guerilla n'a pas cherché à trop en faire, n'avait pas des ambitions narratives démesurées et dans ce cadre un peu pop-corn, ça fonctionne sans trop de mal (au moins pour moi). Les déplacements et rotation du personnage qu'on incarne ont un poids et une lenteur franchement bienvenus, même si peut-être un peu trop pour être vrai. En tout cas ça participe grandement à donner du corps à l'expérience.

Le noir et blanc et flou quand on est blessé est franchement pas sympa, mais il apparaît vraiment au dernier moment, juste avant qu'on meure. Avant c'est des traces de sang sur la périphérie de l'écran mais l'image n'est pas dégradée, c'est déjà ça... Cette génération m'aura décidément appris à me satisfaire de peu !

Mais faire mouche sur un type au jugé sans réticule et s'en rendre compte en voyant son corps repoussé et chauffé à blanc sur les points d'impact successifs au gré de la rafale... Ça n'a vraiment pas de prix. Meilleur FPS sur PS3.

Avant de se laisser (cette fin à rallonge !) : je me dis que ça aurait été intéressant que le coup de crosse désarçonne plus franchement l'ennemi, de manière à le rendre vraiment vulnérable à nos tirs ensuite.

lundi 22 avril 2013

killzone HD (ps3)

Jeu terminé avec Templar en mode difficile (3/3).

Il y a des choses assez géniales dans le premier Killzone, que j'ai redécouvert grâce à son portage HD sur le Playstation Store. Il trouve une solution à un problème de game design qui se pose forcément dans un FPS et que les jeux de ce genre de notre époque ne résolvent pas forcément : comment communiquer au joueur que l'ennemi sur lequel il est en train de tirer est mort ? C'est assez peu clair dans Killzone 3, la transition d'un ennemi de vie à trépas. Dans le premier Killzone c'est limpide. Ils ont utilisé à la fois le son et l'image pour donner ce retour au joueur.

Du côté du son, ça va se traduire par un râle de l'ennemi bien spécifique. Les ennemis gémissent dans ce jeu, à chaque tir reçu, ils s'expriment beaucoup aussi, on les entend beaucoup parler. Il y a une différence entre le gémissement lié à une blessure et le râle de la mort. Et cette différence on l'apprend naturellement en jouant au fil des niveaux, jusqu'à ce que ça devienne un élément extrêmement fiable pour repérer la mort d'un ennemi. Ce qui permet à ce « truc » de marcher, c'est que les voix ne sont pas ou peu localisées dans l'espace sonore, et que la bande-son n'est pas du tout surchargée. Nos coéquipiers on les entendra nous parler aussi bien même s'ils sont loin par exemple. Les voix des ennemis, leurs cris, pareil. En plus de ça il n'y a jamais de musique pendant qu'on joue et l'environnement est toujours calme, c'est limite s'il n'y a pas aucun son. Je n'avais aucun mal à percevoir au niveau auditif les cris ennemis et leur nature.

Du côté de l'image, ça se traduit par une rupture très nette dans l'animation du corps ennemi. Il va se raidir puis tomber d'un coup. Ça choque, ça ne peut pas être confondu avec un mouvement quand il est en vie et c'est très bref. D'ailleurs il y a un ennemi plus loin dans le jeu où cette rupture est beaucoup moins nette et je me suis pris à me demander s'il était bien mort, pendant deux, trois secondes jusqu'à ce que son corps tombe par terre. Mais c'est l'exception dans ce jeu qui confirme la règle.

Autre chose qui est très réussie c'est comment le jeu nous communique la nature de l'impact de chacun de nos tirs, du moindre d'entre eux. Est-ce que cette balle précise que j'ai tiré – même pour les armes automatiques, attention – a frappé un mur ou un ennemi ? Le retour au joueur est très clair. Si on tire dans le décor : petit nuage de poussière très visible à l'endroit de l'impact. Si on tire sur un ennemi : petit nuage de sang très visible à l'endroit de l'impact et cri de l'ennemi. On ne peut pas avoir de doute dans Killzone sur le « destin » de chaque balle tirée. Ça fonctionne aussi parce que les armes ont une dispersion et une imprécision notable, ce qui fait qu'on ne va jamais tirer deux balles d'affilée qui vont arriver au même point. Les petits nuages de poussière sont donc tout le temps épars.

Contrairement, une nouvelle fois, à pas mal de FPS contemporains ici chaque arme est unique. On peut en porter seulement trois et ramasser celles des ennemis. Dans Killzone 3 quasiment toutes les armes sont des variantes d'armes automatiques, dans les grosses lignes elles sont équivalentes et on préférera systématiquement la plus puissante / précise d'entre elles. Dans Killzone déjà les armes ont des modes de tir secondaires. Ensuite, un bon pourcentage d'armes n'est pas constitué d'armes automatiques. Enfin, entre les quatre armes automatiques disponibles dans la campagne de Templar, le choix n'est pas évident.

Le fusil d'assaut ISA est relativement précis, c'est-à-dire que l'on peut s'y fier pour des tirs localisés (je reviendrai sur le « relativement » plus tard) et il dispose d'un lance-grenade intégré (les explosions dans Killzone ça fait mal, en tant que joueur en ligne de la première version je l'ai appris à mes dépens) ; problème, ses munitions sont rares. Le fusil d'assaut Helghast est peu précis mais il a un gros chargeur et on trouve des munitions sur chaque cadavre. Arroser l'ennemi peut être une stratégie payante. En sus l'arme dispose d'un fusil à pompe intégré, qu'on doit recharger à chaque tir mais dont on trouve une cartouche (stock de 8 maxi) sur chaque ennemi qui utilisait cette arme. La mitrailleuse STA-3 est une grosse arme, peu précise mais un peu plus que le fusil d'assaut Helghast, avec un chargeur énorme et une grosse cadence de tir, mais sans mode secondaire. Contre un groupe d'ennemi à courte voire moyenne portée, ça le fait. Enfin le pistolet automatique M66-SD, doté d'un zoom avantageux, s'il n'a à peu près aucun intérêt dans son mode primaire (automatique) il trouve toute sa valeur en mode coup par coup, qui tire à peu près une balle sur trois dans le mille mais qui a une heureuse tendance à tuer en un coup les ennemis quand on les touche à la tête (ce qui n'est pas le cas des autres armes, point important). C'est tout pour les armes automatiques.

Le reste de l'arsenal est constitué principalement d'armes « à explosions », deux lance-grenades, deux lance-roquettes et un canon similaire à un mortier. Du côté des armes explosives le choix est plus simple car il existe une hiérarchie assez nette, c'est dommage. Par exemple, entre les deux lance-grenade, il y en a un qui est en tous points plus intéressant que l'autre (cadence plus élevée et possibilité de changer les grenades en mines, même si cette dernière fonction est vraiment anecdotique dans l'aventure). Les lance-roquettes ne sont vraiment utiles qu'à des moments-clés de l'aventure (pour détruire des chars par exemple) et le jeu en fournit quand ils sont nécessaires. Le canon mortier, lui, enterre les lance-grenades, il est redoutable ; quand on en trouve un on cherche pas à comprendre, on le ramasse direct.

Je parlais de « relativement précis » pour le fusil ISA et c'est un point assez intéressant du jeu. Toucher l'ennemi à moyenne portée avec cette arme nécessite de composer avec la dispersion et le recul de l'arme, pas gigantesques comme dans un FPS moderne mais pas négligeables non plus. On parle avec Killzone d'un FPS sans iron sight : on vise avec le réticule affiché à l'écran, précis, de forme immuable (pas comme les quatre traits de Call of Duty ou Far Cry 3 ou tout le reste de la clique), qui change pour chaque arme. Le recul pour le fusil ISA est indiqué par le réticule qui se lève au fur et à mesure des tirs, qui tressaute de plus en plus haut à chaque balle tirée. La dispersion on peut l'observer précisément grâce à la représentation des impacts dont j'ai parlé plus haut. Tout ça pour dire que tirer précisément avec le fusil ISA n'est pas dénué d'intérêt, n'est pas évident ; cependant le problème reste un peu simpliste et le caractère assez invariable du comportement des armes (qu'on coure ou qu'on s'accroupisse ne fait aucune différence par exemple) n'arrange rien. Le problème se pose un peu de la même façon avec le fusil d'assaut Helghast ; de toute façon on sait qu'on atteindra la cible au petit bonheur la chance, alors on arrose, on arrose (avec un gros réticule) l'ennemi jusqu'à ce qu'il tombe enfin.

Techniquement, le jeu est impeccable sauf pour le clipping. C'est quand même un gros frein au sentiment de se trouver dans l'univers quand on aperçoit le décor qui s'affiche et disparaît à mesure qu'on avance et qu'on recule. Le jeu a pas mal vieilli dans la représentation graphique de son univers, avec relativement peu de détails, des couloirs à murs invisibles grossiers et le pire du pire, une jungle tout bonnement en carton pâte. C'est simple je me croyais dans un décor de studio de tournage tellement l'illusion est mal rendue (et ressort peut-être encore plus en HD). On est censé traverser une jungle dense alors qu'on suit un couloir de deux mètres de large et que la végétation sur les côtés cache très mal un mur avec une texture verte. Certains niveaux (les docks) n'hésitent pas à quasiment copier-coller des pans entiers et les aligner. Les développeurs ont dû se dire qu'après tout Halo a cartonné malgré ça, il n'y a donc pas de raison de se priver.

Si le rendu du jeu est travaillé avec un grain sur l'image, des effets de poussière et de lumière, une palette de couleurs spécifique, la représentation de l'univers est très sommaire et on a du mal à croire qu'il y a eu un jour de la vie dans ces endroits. Le jeu est très « vide » je trouve. Esthétiquement l'univers est très pauvre et le blanc de la bande-son, s'il permet au joueur d'avoir des retours audio précis sur ses actions, n'arrange rien à l'affaire. Killzone HD est malheureusement une odyssée dans un monde qui fait peine à voir, tellement littéralement désert qu'il en perd sa crédibilité.

On se retrouve à enchaîner des niveaux, séparés par des écrans de chargement, qu'on a bien du mal à connecter entre eux et on suit une histoire (principalement grâce à des cinématiques) et des personnages qui sonnent pas mal faux du début à la fin. Le traître je l'ai repéré direct par exemple.

La visée au stick droit, même sans zoomer, est bien implémentée, j'ai pas de mal à être précis. Le jeu est plutôt long mais propose un challenge limité. Il existe des FPS plus bourrins (genre Serious Sam) mais c'est pas non plus un monument de finesse, on joue un peu la même partition du début jusqu'à la fin de l'aventure, et c'est pas une partition affolante d'intérêt. Il y a un système d'auto-régénération et tout le jeu consiste à tirer sur des ennemis et faire gaffe à pas rester trop longtemps sous le feu ennemi pour ensuite se cacher derrière un élément du décor pour que la santé remonte. C'est toujours plus marrant à jouer qu'un COD-like parce qu'il n'y a pas d'indicateur d'objectifs, les armes sont plus intéressantes à manier, sont bien distinctes et doivent être domptées dans une certaine mesure, et puis les retours au joueur sont plutôt exceptionnels. Malheureusement l'histoire ne prend vie que timidement dans les cinématiques entre chapitre et on se retrouve inexorablement à arpenter des niveaux sans vie, tristes, et éliminer des groupes d'ennemis sans que notre personnage s'exprime (muet dès qu'on l'incarne). C'est un sentiment de vide, de rien, de mort qui se dégage de la partie jeu. C'est pas du tout le cas dans Killzone 2 qui a bien plus travaillé sa réalisation, sa... mise en scène ?

Un jeu gris (palette de couleurs bien limitée), morose en fait, malgré de bonnes idées de game design - j'entends tout ce qui relève du maniement et des retours au joueur. Toujours bon à prendre, le jeu est fluide sur cette version, mais seulement à 30 fps (plus que l'original). Pour moi c'est un jeu inabouti. Il propose des choses intéressantes mais s'est arrêté en cours de route. Exceptées les fusillades, rien ne prend vie en parcourant Killzone HD. Ni l'environnement, ni les personnages et leurs enjeux. Un adjectif ? Déprimant.

mercredi 17 avril 2013

doom 3 (xbox)

Conditions de jeu :

- fini en mode facile ou normal (1/4 ou 2/4), je peux pas dire
- vue sprint activée
- vitesses de rotation horizontale et verticale par défaut
- luminosité et contraste au maximum
- assistance à la visée désactivée
- pas de sauvegarde pendant les niveaux (ce qui implique de recommencer au début du niveau en cas de mort, alors que le jeu nous donne la possibilité de sauvegarder à tout instant et propose une fonction de sauvegarde rapide)
- s'accroupir mode maintenir

Introduction

Doom 3 sur Xbox est un FPS initialement développé sur PC par id software et porté sur Xbox par Vicarious Vision. Il nous raconte l'histoire d'un Marine de l'espace en mission sur Mars. C'est dans le futur. C'est pas sur Mars dans le désert rouge mais principalement dans une installation humaine, une station de recherche relativement vaste, bien que constituée de couloirs assez étriqués. La situation pour le Marine va rapidement dégénérer alors que la station est plongée dans l'obscurité et que des créatures monstrueuses dotés de pouvoirs inexplicables apparaissent de partout, tuant tous les humains sur leur passage tandis que les survivants semblent possédés par une mystérieuse entité...

Mes critères sont les suivants : qualité du script (cinématiques, dialogues et épreuves en jeu), cohérence des règles du jeu (= game design = ce qu'il y a dans le manuel et tous les paramètres de contrôle du personnage) avec l'histoire, intérêt ludique du challenge et crédibilité de l'univers (ou qualité de la mise en scène).

Le contrôle du personnage

On déplace le Marine de l'espace en translation sur le plan avec le stick gauche (classique). On le fait tourner dans les quatre directions avec le stick droit. La gâchette droite de la manette sert à faire feu avec l'arme équipée. La gâchette gauche, maintenue, permet de sprinter. Deux des boutons de façades (Y et B) permettent de s'équiper des armes suivante et précédente. X sert à recharger. On saute avec A. On maintient le stick gauche appuyé pour rester accroupi. On maintient le stick droit enfoncé pour zoomer sur le centre de l'écran. Le bouton blanc permet de substituer l'arme équipée à la lampe torche et vice-versa. Le bouton noir ouvre le PDA du Marine. Les flèches du bouton multidirectionnel (BMD) sont chacune un raccourci vers une arme.

Doom 3 arrive à mon sens à un magnifique compromis entre réactivité et poids du personnage. Le résultat donne une touche fortement humaine au Marine à travers le contrôle, mais sans non plus nier ses capacités physiques de soldat bien entraîné. Un juste milieu assez impressionnant en fait, pour des déplacements très crédibles.

Concrètement, ça passe par une direction artistique forte dans les réglages des déplacements, de la vitesse de visée et de la physique du corps du Marine. Quand on saute, on retombe vite une fois la hauteur maximale atteinte. On ne tourne pas très vite sur nous-même, on ne marche pas très vite (c'est homogène). En avançant vers l'avant, on ne peut pas se mettre à reculer à vitesse maximale instantanément. Nos mouvements ne sont pas "parfaitement" fluides, on ne flotte pas, on a du "poids", on entend clairement nos bruits de pas. Notre vitesse de déplacement progresse avec la poussée sur le stick, elle part très tôt (stick à peine à peine incliné) de très lent (tortue). Tant et si bien que nous contribuons nous-même à cette subtile impression d'inertie : il faut le temps que nous poussions le stick à fond pour que le personnage aille à sa vitesse maximale.

Dans la même logique, le passage d'une arme à l'autre n'est pas instantané. Sans être rallongé de manière absurde (le premier Killzone), il n'est juste pas immédiat. Le soldat s'équipe rapidement de sa torche, il est efficace, mais ça ne se passe pas non plus en un éclair. Il y a une subtilité du dosage devant laquelle je suis admiratif.

Maintenir enfoncé le stick gauche pour rester baissé, le même stick qui sert à se déplacer, quoi de plus intuitif ? Quoi de plus pertinent ? Même remarque pour le zoom sur le stick droit. En enfonçant le même stick qui nous sert à déplacer le regard du Marine, on se concentre sur le milieu de l'écran. D'une cohérence remarquable.

La fonction de sprint vient avec une barre d'endurance, c'est-à-dire qu'on ne peut pas sprinter indéfiniment. Bonne idée, la "vue sprint" change le simple sprint en une "alerte" physique plus générale du personnage, qui voit alors sa vitesse de rotation augmenter en même temps que celle de ses déplacements.

Le réticule de visée est précis, bien moins gros que celui de Halo mais pas non plus minuscule, les armes n'ont pas de dispersion, le réticule reste toujours entier (il est d'ailleurs identique pour toutes les armes). Le zoom n'a pas une fonction de "tir plus précis" mais simplement d'observation, le fait qu'il faille maintenir le stick de visée confirme cela. On n'a donc pas d'iron sight cheaté (ralentissement des déplacements, zoom sur le centre de l'écran, sensibilité du stick diminuée) pour nous mâcher le travail, ni la possibilité d'arroser les monstres au pif étant donnée la grande précision de l'armement. Tout ceci participe ni plus ni moins à un vrai challenge de visée comme on n'en fait plus.

Devoir ranger son arme pour attraper sa torche, avec le bouton blanc, accentue l'imperfection du personnage, ce qui le rend d'autant plus intéressant à incarner. On n'est pas dans la peau d'un Marine qui a une lumière fixée sur ses lunettes qui éclaire précisément le milieu de tout ce qu'il regarde. Non là le type quand il veut jeter de la lumière là où il vise il range son flingue et se saisit de sa lampe en la tenant fermement au poing à hauteur du visage (on se voit dans les miroirs). Il va pas chercher un moyen de faire tenir la lampe sur son armure et se satisfaire d'une direction d'éclairage imprécise ; il préfère faire le truc à fond et bien, la prendre à la main et la diriger où il veut. Terrien le type. Cette décision de design donne de l'humanité au héros. Le fait d'y avoir dédié un bouton facilement accessible permet de basculer assez vite entre l'arme et la lampe. Encore une fois, les développeurs ont trouvé un juste milieu : ne pas pouvoir éclairer en braquant, certes, mais que dégainer la lampe torche ne soit pas plus contraignant que de raison.

Le système

Le principe de Doom 3 est celui d'un jeu de parcours : on commence à un point A et il s'agit de parvenir entier à un point B. Une fois atteint un niveau supérieur on ne peut pas revenir sur nos pas. Battre le jeu consiste à terminer tous les niveaux dans l'ordre de l'histoire. Il faut noter que le jeu n'appelle à aucun - j'insiste - objectif autre que celui du personnage à tel moment. Les seuls objectifs qui seront donnés au joueur seront explicitement ceux du personnage. Aucun décompte de monstres tués ou de secrets découverts : la quête, et rien que la quête.

Le fait de pouvoir porter une dizaine d'armes sur soit me fait m'interroger. Où le Marine peut bien les planquer ? Ça me dérange pas des masses. Je peux facilement imaginer qu'il arrive d'une manière ou d'une autre à tout stocker ça sur lui, même si concrètement je vois pas comment. Ça ne me dérange pas vraiment même si je ne peux expliquer ce point. Sans doute que c'est pas "trop" gros comme aberration et que c'est aussi l'exception qui confirme la règle d'un réalisme physique autrement à toute épreuve.

Une règle un peu plus gênante car qui va plus loin dans l'abstraction, c'est l'attribution des armes aux raccourcis du BMD. Un point important des règles du jeu consiste en la possibilité d'associer une arme à une direction du BMD pour pouvoir l'équiper rapidement. C'est à peu près la seule action du joueur qui ne correspond à absolument rien dans l'histoire que voudrait raconter Doom 3.

On peut sauvegarder à tout moment. Mince, deuxième action du joueur qui ne correspond à rien. La sauvegarde est un problème complexe dans les jeux. D'un côté un jeu un peu long ne peut exister sans sauvegardes à moins de demander au joueur de jouer ou au moins laisser allumée sa console très longtemps. Ce n'est donc pas envisageable. Un compromis acceptable pour moi consiste à placer des points de sauvegarde à des moments qui correspondent à des "pauses" dans l'histoire. Dans un livre ce serait la fin d'un chapitre. Dans un jeu comme Doom 3, typiquement, ce serait entre deux niveaux - ici séparés par un sas et un écran de chargement. Ça a plus de sens je trouve de laisser le joueur recommencer à partir du début de ce qui constitue plus ou moins le "chapitre" en cours plutôt qu'à n'importe quel moment.

C'est précisément ce que fait Doom 3. Le jeu retient l'état de notre personnage au début du niveau (son équipement et sa santé) et nous permet de recommencer à ce point quand on est mort. Le problème, c'est qu'il nous permet aussi de sauvegarder n'importe quand. D'une part, comme expliqué au-dessus, ça n'a pas beaucoup de sens dans la narration, et d'autre part le jeu n'est ni injuste, ni trop dur (on y reviendra) : il aurait pu se passer de cette fonction. À la place, il aurait pu soit sauvegarder automatiquement uniquement au début d'un niveau, soit sauvegarder quand on quitte vers le menu - histoire de pouvoir reprendre où l'on s'est arrêté la fois suivante, mais tout en nous faisant toujours revenir au début du niveau en cas de game over.

La santé du personnage ainsi que l'état de son armure sont représentées en valeurs numériques qui vont de zéro à cent. Je n'ai pas de problème avec cette abstraction de la réalité. Pourquoi une balafre d'un monstre ne se traduirait pas par un pourcentage diminué d'un tiers ? Ça représente bien la vulnérabilité accentuée du personnage, qui au plus il est blessé, au plus il risque d'y passer à la prochaine attaque subie. On peut restaurer sa santé grâce à des trousses de soin et auprès de stations médicales. Pour l'armure, même constat : la représentation de son état par une valeur numérique qui descend lors d'une attaque de monstre et qui remonte lorsque l'on trouve des éléments pour la réparer (des "pièces d'armure"), ou même une flambant neuve, ne me dérange pas.

Le PDA est un appareil qui stocke le contenu des autres PDA ramassés dans l'environnement. On aura besoin de ces derniers pour télécharger les droits d'accès à des zones verrouillées qu'ils contiennent et on pourra lire les messages textuels et audio enregistrés. L'intérêt de ces messages est qu'ils font parfois référence à une salle ou un casier verrouillé et en donnent (ou non) le code. Ces salles contiennent des ressources pour notre personnages.

J'en viens à parler des ressources : elles sont indispensables à la progression. Aucune arme n'a de munitions infinies. Les armes elles-même ne se livrent pas à nous automatiquement, il faut les trouver. Et comme je le sous-entendais plus haut, quand on ramasse une arme, elle est dans notre inventaire pour tout le reste de l'aventure.

L'évolution du personnage dans l'environnement est remarquable en ce que le jeu ne donne pas de carte au joueur et n'affiche pas d'indicateur d'objectif en surimpression à l'écran (et pas non plus de fil d'Ariane à la Dead Space). On doit trouver son chemin tout seul, par l'exploration et l'observation.

Il y a un point négatif à évoquer encore : quand on tire sur un ennemi, le meilleur retour qu'on a, c'est que le viseur devient rouge. C'est assez anti-immersif comme mesure. Devoir se fier à l'observation des mouvements ou au son aurait été mieux pour l'expérience narrative. Par contre, le viseur continue d'être rouge quand on tire sur un cadavre, donc là on nous demande par contre d'observer bien l'ennemi... Mouais. La combinaison des deux me semble un peu malhabile.

Mais bon. Contrairement à d'autres jeux où ce genre de détails sont la règle, ici ce sont des exceptions. Ça ne m'a pas gâché l'aventure.

Comment se déroule un niveau ?

Comme dit plus haut on est dans un jeu de parcours. Le personnage reçoit ou a reçu un objectif (dans un niveau antérieur) et on est dans sa peau pour le remplir. Le fait de ne pas sauvegarder et de ne pouvoir reprendre qu'au début du niveau rend le jeu très intense. On évolue dans des couloirs de la station martienne, ils sont sombres de manière générale, ils fourmillent de recoins encore plus sombres, de panneaux de conduits de ventilation, de portes dérobées, desquels on n'est jamais à l'abri de voir surgir un monstre. Et ils font mal, et notre santé ne se régénère pas. Ce qui pousse à une façon de jouer extrêmement prenante et minutieuse.

Ça va se traduire par une avancée tout sauf en maintenant la touche de sprint enfoncée, mais au contraire à petits pas. On va dégainer la lampe torche pour éclairer une zone sombre afin de ne pas être pris par surprise par un ennemi silencieux. On va être très attentif au son, parce que des monstres peuvent se téléporter hors de notre champ de vision mais en contrepartie ils produisent un son caractéristique. On peut donc identifier la menace en prêtant bien l'oreille. Si je résume : j'avance doucement, aux aguets, je dégaine ma lampe dans une zone louche pour mettre littéralement en lumière les menaces qui peuvent m'y attendre. Et ça, tout le long d'un niveau.

Je parlerai des combats plus loin, mais il apparaît très vite qu'on ne peut se contenter des cent points de vie avec lesquels on démarre. Les erreurs, que ce soit dans les combats eux-même ou leur anticipation, sont tolérées mais doivent être assumées. Avec des monstres de plus en plus nombreux et puissants au fur et à mesure qu'on avance, il est rapidement évident que pour espérer mettre toutes nos chances de notre côté afin de survivre, il va falloir dégoter du matériel. Personnage à requinquer + futur inquiétant (comment je vais affronter les prochains monstres avec mon pauvre pistolet ?) = recherche de ressources.

On est donc très logiquement amené à bien explorer le niveau. Se constituer un stock de munitions pour les affrontements déments potentiellement à venir, soigner le héros après un rude combat ou une imprudence, reconstruire son armure et même, soyons fous, peut-être dégoter un nouvel engin de mort à ajouter à l'inventaire. Voilà ce que je cherchais quand j'explorais un dédale de Doom 3 au lieu de filer droit à l'objectif. Je m'assurais de mettre toutes les chances de mon côté pour pouvoir survivre aux crises à venir.

On ramasse aussi des PDA ayant appartenu à de défunts membres de la station et on lit leur contenu pour avoir les codes qui ouvriront les compartiments fermés. Le truc c'est qu'en lisant, on en apprend un paquet sur la station, ses habitants et les événements qui ont précédé voire même déclenché la crise. On lit les messages depuis notre PDA, dans un menu qui prend tout l'écran et met le jeu sur pause, mais dans le cas d'un message audio on peut quitter le PDA et la lecture continuera en jeu. Très bonne idée. Mais l'excellente idée ici, c'est bien de faire passer le background, intéressant, dans la confrontation du joueur au challenge. C'est pas comparable à un Bioshock Infinite (ou le premier Bioshock) où les voxophones n'apportent rien au joueur. Ici, dans la quête tout à fait logique de puissance, on est amené à décortiquer des textes, écouter avec attention des enregistrements, et mine de rien ça nous renseigne beaucoup sur l'univers. Jolie idée.

Il faut préciser que l'usage de ces codes dans l'environnement n'est pas évident, en ce qu'on en a parfois plusieurs en même temps "en attente" et que le bon endroit où utiliser chacun d'entre eux n'est pas du tout obligé d'être à côté de l'endroit où l'on a ramassé le PDA ni même dans le même niveau ! Il faudra se référer aux autres indications présentes dans les messages (bureaux de M. Untel, casier numéro 123) et observer attentivement le décor (par exemple la plaque de porte avec écrit le nom et la fonction du gars) pour déduire quel code utiliser. Ceci afin de découvrir des codes de portes et de casiers renfermant des ressources pour notre personnage (parfois très loin du lieu où l'on ramasse le PDA, voire même dans un niveau supérieur). Et il y en a pas mal des PDA. Faut pas croire qu'on a un PDA tous les cinq niveaux avec un seul message avec un code dedans. Y'a plein de PDA, avec deux à trois messages dedans en moyenne.

Le niveau peut également être ponctué d'une rencontre avec un personnage plus ou moins secondaire qui peut déclamer un monologue alors qu'on garde le contrôle, ou encore une brève cinématique.

En conclusion de cette partie, c'est du vrai survival, sans apprentissage par l'erreur, avec des fautes et des choix à assumer et une tension permanente. Je devais me faire les niveaux d'une traite et c'était très bien. J'ai eu beau mourir quasiment jamais, à chaque seconde j'étais sur le fil. Devoir être attentif en permanence, ça c'est la classe.

Les combats

Bien sûr le principal obstacle du protagoniste en plus de la progression dans l'environnement, ce sont les ennemis, les monstres.

Affronter un seul ennemi d'un certain type a le mérite d'être assez simple, ou du moins, au fil des rencontres et des erreurs, on comprend comment l'ennemi fonctionne et ce assez rapidement. Il va s'agir donc, face à un ennemi, d'être précis à la visée (je ne le dirai jamais assez, le challenge de visée ici est bien plus consistant que dans n'importe quel FPS de cette génération, par l'absence d'iron sight craqué, la nécessité de tirer tout en bougeant, la taille réduite du réticule et la grande précision des armes) et d'appliquer la stratégie qu'on aura élaboré au préalable après plusieurs rencontres avec le même ennemi.

Cette stratégie c'est plusieurs choses : quelle distance j'essaye de garder avec l'ennemi ? Quelle arme j'utilise ? Comment j'évite ses attaques (je me baisse, je cours sur le côté, je fuis ?) ? Est-ce qu'il y a une position dans le niveau d'où je serais avantagé pour l'affronter ? Comment je peux utiliser l'architecture à mon avantage ?

C'est assez riche, parce que par exemple ici, se baisser sert à quelque chose. Les boules de feu qu'un ennemi nous envoie quand on est debout, on les esquive tout simplement en se baissant, comme d'ailleurs certaines attaques comme au corps à corps. Un gros mastodonte bien résistant, un escalier et une rambarde, ce sont des déplacements intelligents et des sauts bien ajustés qui vont nous permettre de le ridiculiser. Monter sur des caisses, sprinter, sont d'autres actions qui trouveront leur utilité.

Et après, évidemment, il va falloir gérer des groupes d'ennemis, parfois de différents types. Les combats de Doom 3 sont pas chiants, ils sont réglos, en utilisant bien son équipement, en suivant les stratégies bien précises qu'on aura découvert, on pourra s'en sortir. Ils se marient bien avec l'aspect survie parce que sans être du tout enfantins, ils versent jamais dans le truc impossible que tu ne peux résoudre qu'en mourant plein de fois. Je le redis, je suis mort très peu de fois dans toute l'aventure. Et c'était passionnant.

Le seul reproche que je ferai ce sont les quelques fois où j'ai dû tirer dans le noir. Genre j'étais bloqué dans le noir et des ennemis m'entourent. C'était pas fréquent, mais ça arrive et je ne vois pas trop l'intérêt. Puisque là c'est un peu au petit bonheur la chance, même si on a des retours qui nous renseignent si on fait mouche (le viseur devient rouge) et qu'un ennemi qui meurt, c'est un ennemi qui ne fait plus de bruit ou qui râle (plus sûr qu'il y ait un râle spécifique pour la mort). Mais quand même, c'est pas terrible du tout.

Le scénario

L'histoire est limitée par le fait qu'elle caractérise très peu son héros, muet, qui passera son temps à suivre les ordres de divers commanditaires, ou, parfois, son instinct de survie. Heureusement le jeu arrive à lui donner de l'humanité.

La deuxième limite de l'histoire, c'est son côté un peu lent et répétitif : on va quand même se taper beaucoup de couloirs qui se ressemblent, disons que ça traîne un peu en longueur.

À côté de ça, on a un mystère et une mythologie SF qui moi m'a beaucoup intéressé, et un scénario qui arrive à bien les mettre en avant, à bien s'en servir lors de divers rebondissements. Le script ménage plusieurs sorties du personnage à l'extérieur de la base, un voyage en téléporteur qui ne se passe pas tout à fait comme prévu et un arc scénaristique final assez impressionnant.

Le scénario de Doom 3 est franchement pas mauvais, il y a beaucoup de péripéties, de nouveaux décors, de nouvelles situations qui amènent des challenges différents au personnage...

J'ai pas trop envie de spoiler, mais par exemple le voyage en téléporteur, il a un impact sur le jeu. On va ressentir en jouant ce qui s'est passé parce que les règles sont chamboulées. Donc là on a un exemple de rebondissement qui s'appuie pour être raconté sur le level design et le game design.

Ce que j'ai beaucoup aimé aussi, c'est tout le mystère, l'énigme, dont le jeu donne tout à fait les réponses et qui a des implications métaphysiques auxquelles je suis toujours sensible dans les fictions (l'origine de l'humanité par exemple). Un point commun avec un film que j'ai adoré des années 70, Les monstres de l'espace, c'est que le jeu donne en fait une explication à un point de notre culture. Le film cité expliquait le pourquoi de tous les phénomènes paranormaux relevés par les humains depuis l'aube des temps. Ici, avec Doom 3, ça va être notre représentation de l'enfer. Pourquoi dans notre culture, on a un truc qui s'appelle l'enfer et qu'on imagine rouge, avec de la lave, etc ? Et bien Doom 3 propose une réponse.

Je retiendrai notamment que la mythologie et sa découverte s'inscrivent très bien dans le scénario.

La réalisation / crédibilité de l'univers

La réalisation graphique est excellente, ils se sont donné les moyens de représenter leur univers. L'esthétique clinico-industrielle plongée dans la pénombre crée avec les bruits d'engin de la machinerie une ambiance assez suffocante et claustrophobe, de l'enfermement, renforcé par l'étroitesse des niveaux. L'extérieur, du peu qu'on en voit est un désert rouge extrêmement inhospitalier (les rares sorties demandent de gérer son oxygène). C'est oppressant, quoi. Il y a du sang sur les murs et des cadavres aussi.

Les déplacements du héros gagnent en crédibilité grâce aux bruits de pas. Les armes doivent beaucoup à leur bruitage, au fait que chaque projectile a un impact et un son particulier en fonction de où on tire (pénétration dans la chair, sang, râle du monstre).

J'ai eu bien l'impression d'être sur Mars, isolé, loin de tout.

L'environnement existe et n'est pas là pour nous faire plaisir. On parle d'un jeu où on peut se faire écraser par un ascenseur, où on se fait mal quand on tombe (on peut bien sûr mourir comme ça) et où il n'y a aucun mur invisible pour nous empêcher de faire une chute mortelle ou simplement pour nous empêcher d'aller par là.

J'ai une anecdote à ce sujet. J'étais devant un tas de débris dans un couloir. Je me dis "ah tiens, un obstacle pour qu'on passe pas derrière, c'est bizarre". Dans un autre jeu ça aurait été ça. Dans Uncharted, un tas de débris qui obstrue un couloir c'est pour t'empêcher de passer. Dans Doom 3, non. J'ai sauté, j'ai escaladé les débris et total, je suis tombé sur la fin du couloir avec des cellules pour BFG planquées là (des munitions). Chapeau les potes, que voulez-vous que je vous dise ? Bon c'est pas forcément l'endroit le plus logique pour trouver des munitions, d'accord.

Conclusion

Malgré des imperfections principalement scénaristiques, au niveau du récit qui traîne en longueur et du personnage impassible, Doom 3 est une sacrée réussite. Il y a quelques éléments de jeu un peu absurdes, mais peut-être parce qu'ils sont une minorité, je suis arrivé à les accepter et à ne pas être gêné outre mesure. C'est assez rassurant qu'un FPS où le personnage peut porter dix armes sans explication parvienne à me captiver. Je suis content que des règles en soit intéressantes (devoir choisir sur un panel de dix armes) n'entravent pas forcément mon attachement au récit. Ça doit être, notamment, une question de dosage. Après bien sûr, je ne saurais trop vous encourager, comme moi, à faire le jeu sans sauvegarder à part quand vous arrêtez de jouer. Ça c'est un vrai très mauvais choix de la part des développeurs. Pour le reste et en ce qui me concerne, Doom 3 est un excellent survival-horror orienté action.

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